Retour sur la loi relative aux services express régionaux métropolitains

Emmanuel Macron a annoncé le 27 novembre 2022 que la création de « RER métropolitains » constituait une priorité nationale. Cette initiative entre dans la stratégie en matière d’écologie proposée par le Gouvernement. En effet, « pour que la France atteigne ses engagements en matière climatique, l'offre de transports en commun du quotidien doit progresser de 20 à 25 % d'ici 2030. » . Cela s’est traduit par une proposition de loi, déposée le 25 avril 2023, ayant pour objet de déployer des Services Express Régionaux Métropolitains.

Comment la loi définit les SERM ? Quels enjeux de gouvernance et de coordination ? Comment la société du Grand Paris se transforme ? Quels financements pour ce projet ambitieux ?

Une loi axée sur l’intermodalité plus que sur le ferroviaire. 

Bien que, dans l’opinion publique, cette loi semble impulser des projets de création de RER métropolitains, elle pousse davantage en faveur du développement d’offres multimodales. Cette orientation est perceptible dans l’évolution du texte tout au long du processus législatif. À l’origine, le texte proposait le « renforcement de la desserte ferroviaire et […], le cas échéant, la mise en place de services de transport routier à haut niveau de service ainsi que la création ou l’adaptation de gares ou de pôles d’échanges multimodaux ». 

Le texte final va plus loin, en faisant de l’intermodalité le vrai sujet de cette loi. En effet, il est désormais prévu dans le texte final que « cette offre intègre la mise en place de services de transport routier à haut niveau de service, de réseaux cyclables et, le cas échéant, de services de transport fluvial, de covoiturage, d’autopartage et de transports guidés ainsi que la création ou l’adaptation de gares ou de pôles d’échanges multimodaux ». Ce texte particulièrement ambitieux prévoit la mise en place d’au moins 10 services express régionaux métropolitains dans les dix prochaines années. 

La notion de SERM consacrée par la loi complète ainsi la définition des SERM proposée par le Comité d’orientation des infrastructures dans son rapport de 2022 : « Investir plus et mieux dans les mobilités pour réussir leur transition ». Le SERM y était défini comme « une offre ferroviaire, destinée aux voyageurs, dont la fréquence à l’heure de pointe est inférieure à 20 minutes et en heure creuse, inférieure à 60 minutes. » 

Ce projet entérine aussi la possibilité de mettre en place un billet unique contribuant à la création d’un « choc d’offre de service ». 

Cependant, cette intermodalité doit être nuancée. En effet, le SERM doit s’appuyer « prioritairement » sur un renforcement de la desserte ferroviaire. De plus, l’expression « le cas échéant » implique que seuls les transports routiers de haut niveau et la création de réseaux cyclables sont obligatoirement prévus aux côtés de la desserte ferroviaire dans un SERM. Il est possible de se questionner quant à la réalité de la mise en place de services de covoiturage ou encore d’autopartage au sein d’un SERM, notamment pour des raisons budgétaires. Ainsi, la desserte ferroviaire demeure la colonne vertébrale d’un SERM. 

SERM

Un véritable enjeu de coordination et de gouvernance  

De véritables enjeux de coordination se dessinent avec cette loi à la lumière des nombreux acteurs locaux qui y figurent, Cela traduit une certaine volonté décentralisatrice qui transparaît dans ce texte. En effet, les projets de SERM font l’objet d’une concertation entre les collectivités territoriales et l’État. Les maires des communes concernées par un SERM seront informés en amont du déploiement d’un projet de SERM. 

Concernant la mise en œuvre des projets, il est prévu que les « collectivités territoriales, les établissements publics, les sociétés, les groupements et les organismes dont l’objet concourt à la réalisation de ce projet de service et qui sont, dans ce cadre, maîtres d’ouvrage constituent un groupement d’intérêt public » ou une « autre structure locale de coordination ». 

De plus, une convention peut être passée entre la Société des Grands Projets ou sa filiale et SNCF Réseau lorsque la maîtrise d’ouvrage d’infrastructure leur a été confiée en vue, notamment, de définir les modalités de coordination des différents maîtres d’ouvrages. 

Une convention doit être signée, pour une durée de 10 ans, entre le Groupement (ou la « structure locale de coordination »), l’État et les AOM concernées ainsi que « lorsqu’ils participent au financement du projet, les collectivités territoriales ou les groupements de collectivités. ». Celle-ci vise le suivi de la réalisation des ouvrages et infrastructures prévus. 

Enfin, la présence d’un contrat opérationnel de mobilité est nécessaire et doit avoir été signé dans un délai maximal de 6 mois après l’obtention du statut de SERM. Cette obligation a été insérée pour garantir une bonne coordination entre « la région et les autorités compétentes pour l’organisation de la mobilité et des services de transport proposés par le service express régional métropolitain ». 

Concernant la gouvernance, un régime dérogatoire du droit commun a été créé. En effet, la gouvernance du groupement est assurée par « un directoire contrôlé par un conseil de surveillance » composé des personnes morales concourant au financement du SERM. 

De société du Grand Paris à Société des Grands projets. 

La société du Grand Paris est un établissement public créé en 2010 qui avait pour mission principale de contribuer à la réalisation et à la gestion du réseau de transport public du Grand Paris. Celle-ci devait être dissoute après avoir épuisé les compétences qui lui ont été conférées par la loi du 3 juin 2010. 

La loi relative au SERM a transformé la Société du Grand Paris en Société des Grands Projets. Cette dernière voit ses missions étendues, elle ou ses filiales pourront notamment intervenir en amont pour participer à l’élaboration des propositions de SERM. La SGP peut également être désignée maître d’ouvrage des infrastructures de transport. Enfin, « l’établissement public Société des grands projets ou ses filiales peuvent également participer au financement des projets de création, d’extension, d’amélioration ou de modernisation d’infrastructures de transport entrant dans le périmètre d’un service express régional métropolitain. ». Pour exercer ses facultés, la SGP peut créer des filiales. 

La SGP peut acquérir des biens de toute nature, immobiliers et mobiliers, nécessaires à la réalisation des ouvrages pour lesquels elle est désignée maître d’ouvrage au nom et pour le compte de l’Etat. De plus, à l’achèvement des ouvrages, les infrastructures de lignes, les gares de voyageurs, les pôles d’échanges multimodaux ainsi que les biens et droits immobiliers de toute nature sont attribués par l’Etat, à titre gratuit, à SNCF Réseau et à sa filiale mentionnée.  

Le principal apport de la SGP réside dans la possibilité de pouvoir capitaliser sur son expérience pour pouvoir progresser plus vite et réaliser des économies. Cependant, il convient de nuancer ce dernier apport en rappelant que le coût du Grand Paris Express a significativement augmenté sous l’égide de la SGP, comme souligné par la Cour des comptes en 2017, qui disposait que « le risque de dérapages financiers du projet à l’avenir demeure très important ». Il est important de noter à cet égard que le gouvernement remet annuellement au Parlement un rapport relatif à l’évolution des dépenses et des moyens financiers et humains de la Société des Grands Projets. 

Enfin, bien que la Société des Grands Projets soit prévue comme un acteur important des futurs projets de SERM, son implication en tant que maître d’ouvrage est conditionnée à une demande de la région et des autorités compétentes pour l’organisation de la mobilité. 

Le financement, la grande inconnue  

Le financement des SERM constitue l’un des enjeux majeurs de cette loi. Sans un investissement massif, l’objectif de 10 SERM d’ici 10 ans sera difficile à atteindre. 

Cela a été l'un des points de crispation majeurs lors du processus législatif. En effet, le besoin d’investissements pour les infrastructures ferroviaires est estimé entre 15 et 20 milliards d'euros, tandis que seulement 770 millions d'euros, provenant des contrats de plans États-Régions, ont été alloués. Cette somme permettra de lancer les premières études de projets, mais elle est insuffisante pour réaliser des investissements significatifs. Par exemple, le projet de SERM soutenu par la Ville de Toulouse est évalué, à lui seul, à 4 milliards d'euros d’investissement (3,6 milliards d’euros en infrastructure et 492 millions d’euros en matériels roulants). A cela il faut ajouter le cout de fonctionnement estimé à 113 millions d’euros par an pour le projet toulousain. Clément Beaune, alors ministre délégué chargé des Transports, avait toutefois souligné lors des débats devant le Sénat que cette somme n'était "pas un financement exhaustif et définitif." 

Pour obtenir des garanties, le Sénat a introduit dans le texte l'obligation de tenir une conférence nationale de financement d'ici le 30 juin 2024. Cette conférence devra "débattre des solutions à mettre en œuvre pour assurer un financement pérenne des dépenses d'investissement et de fonctionnement de ces services." 

Les collectivités font face à une difficulté majeure en attendant cette commission, à savoir la connaissance de la source des financements. Il faut ainsi rappeler qu’un grand plan d’investissement de 100 milliards d’euros a été annoncé par Élisabeth Borne, alors Première ministre, pour développer le ferroviaire d’ici 2040. Cependant, nous ne savons pas combien d’euros sur ces 100 milliards iront aux SERM. 

Ainsi, si cette loi vise à améliorer les services de transport de proximité, cela doit se concrétiser par un investissement significatif pour soutenir au mieux les projets de SERM. 


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 Sources :

Mission d’information sur le financement des autorités organisatrices de la mobilité de la Commission des finances du Sénat, juillet 2023

Rapport « Investir plus et mieux dans les mobilités pour réussir leur transition » du Conseil d’orientation des infrastructures de février 2023


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