Blockchain : pourquoi elle fascine autant

La blockchain intrigue, la blockain inquiète, la blockchain fascine. Toujours entourée d'un voile de mystère, elle génère un grand nombre d'études, d'expérimentations et de publications. Ainsi, différents consortiums et laboratoires d’innovation (principalement dans les secteurs bancaire et de l’assurance) comme le R3 aux Etats Unis ou le LabChain en France, se sont formés à travers le monde afin d’étudier le sujet au plus près pour en cerner le potentiel exact. Petit tour d'horizon des principales questions toujours en suspens autour de la blockchain…

Sécurité des données

L’intérêt pour la blockchain tient d'abord à la solidité de son système de validation et de sauvegarde, assurant ainsi l’intégrité des données qui y sont stockées. Ainsi, pour altérer un bloc antérieur, il faudrait également pouvoir altérer tous les blocs suivants dans la chaîne et dans tous les nœuds du système. De fait, plus un bloc est ancien et plus il devient difficile à modifier. En outre, si un nouveau bloc apparaît corrompu, une chaîne parallèle est automatiquement créée, par définition plus courte que la chaîne native. Or le système aura toujours tendance à considérer que c'est la chaîne la plus longue qui fait foi, bloquant de fait la tentative de corruption.

Pour contourner ce process, il faudrait donc pouvoir "avancer" dans la validation des blocs plus vite que le reste du réseau. Une théorie possible dans l'absolu sous-réserve que la puissance de calcul des protagonistes malveillants soit supérieure à celle du reste du réseau. D'où le fait que cette attaque théorique soit appelée "attaque des 51%", en référence à la puissance de calcul nécessaire à une telle offensive. Dans la réalité, l'hypothèse est peu vraisemblable dès lors qu'à l'instant où un groupe de mineurs en "pool" est identifié comme regroupant une trop grande puissance de calcul par rapport à l'ensemble du réseau, il est immédiatement repéré et attaqué à son tour par les autres mineurs dans une logique d'auto-régulation défensive.

Cependant, on estime aujourd'hui qu'entre 50 et 80% de la puissance de minage sur la blockchain du bitcoin se trouve en Chine, ce qui peut tout de même poser question sur la décentralisation de cette blockchain dans la pratique.

Transparence

La nature même du protocole de validation, accessible à tout nœud volontaire, assure une traçabilité des transactions et la transparence des activités sur la blockchain. De plus, le système d’enregistrement de la blockchain utilise des arbres de Merkle afin de limiter l’espace disque nécessaire à l’enregistrement de l’historique des  transactions. Ainsi la blockchain donne une piste d’audit complète tout en limitant les besoins de mémoire de stockage (ce qui est également une caractéristique nécessaire dans le domaine financier ou chaque transaction doit être traçable.)

Pseudonymat

Le protocole fonctionne sur un principe de clé publique et de clé privée. La clé privée permet de gérer ses activités et signer des transactions comme par exemple pour la blockchain du bitcoin, effectuer des transactions en bitcoins à partir de son portefeuille électronique ("wallet"). La clé publique, visible pour les membres du réseau permet, elle, d’être identifié et de suivre l'ensemble des transactions sur la blockchain. Les identités des personnes se trouvant derrière ces clés ne sont pas connues par les membres du réseau, assurant le pseudonymat de chacun.

Ce point est à la fois une force pour le secteur bancaire (puisque tout le monde ne souhaite pas que ses transactions soient connues de tous) mais également une des raisons pour lesquelles le bitcoin est très décrié, accusé de participer au blanchiment d’argent. Le KYC ("Know Your Customer") qui prend de plus en plus de place dans les processus financier n’est ainsi pas une idéologie compatible avec le principe historique de la blockchain...

Consommation énergétique

La question de la consommation énergétique est un vrai point sensible dans le cadre du fonctionnement de la blockchain, système excessivement gourmand en énergie pour une raison simple (et qui tient au fonctionnement même de la blockchain) : à partir du moment où chaque mineur du réseau est mis en concurrence afin de résoudre le même problème mathématique à chaque validation de bloc, la multiplication des opérations se paie "cash" en termes de ressources utilisées.

A titre d'exemple, la blockchain du bitcoin requiert un temps de calcul d'environ 10 minutes par opération. Cet aspect est d’ailleurs une des raisons avancées pour expliquer le fait que plus de 50% des mineurs seraient actuellement en Chine (où le coût de l’énergie est très concurrentiel comparé à celui des autres grands pays)

Pour répondre à ce problème de sur-consommation, certaines blockchains tentent de s'organiser. Par exemple via la technique des « proof-of-stake » (preuve d’enjeu) où les équivalents des mineurs sont appelés les « forgeurs ». Dans ce système, le certificateur est "tiré au sort" selon un certain nombre de paramètres définis en amont (pourcentage de monnaies virtuelles détenu par rapport au réseau, ancienneté des monnaies virtuelles détenues, etc.) Revers de la médaille, ce système effectivement moins énergivore se révèle également moins sûr et affaiblit l’aspect décentralisé de la blockchain, c'est à dire sa raison d'être.

En résumé, la question de la consommation énergétique reste un point sensible dans l'univers de la blockchain et demeure sujet à questions au sein de la communauté.

Volatilité

La volatilité des monnaies virtuelles est également un point d’inquiétude dans le cadre de la réalisation des transactions. Le tableau ci-dessous montre ainsi à quel point le cours du bitcoin peut évoluer rapidement à la hausse ou à la baisse.

Capacité(s)

Comme on l'a rappelé précédemment, la blockchain du bitcoin (la plus utilisée à l’heure actuelle) ne permet pas de valider plus de 7 transactions par seconde, ce qui est très faible en regard, par exemple, des 2000 transactions/secondes gérées par Visa Europe. (3)

Cette faible capacité, qui traduit un réel souci de performance, est un des principaux points de divergence et de débats au sein de la communauté blockchain. Pour y remédier, une partie d'entre elle souhaiterait ainsi simplement augmenter la taille des blocs afin d’augmenter le nombre de transactions validées en moyenne par seconde. Or cette solution contribuerait de fait à fragiliser la sécurité du réseau en regard du fait que plus les blocs sont petits, plus leur diffusion au niveau des différents nœuds est rapide (une des bases du système de validation)

Conclusion à ce stade : la faible capacité intrinsèque de la blockchain du bitcoin rend impossible en l'état sa diffusion à grande échelle (sous peine de saturation du système).

Dans le même ordre d'idée, les interrogations subsistent quant au nombre maximum de bitcoins en circulation, leur régulation et leur diffusion reposant davantage sur celle des métaux précieux que sur celle des monnaies, c'est à dire sur une forme de rareté et de non-création. On est donc ici en face d'une "crypto-monnaie" dont une massification trop importante pourrait entraîner un phénomène de déflation.


(3) Visa, leader des paiements en France, développe les usages de demain

Vers un monde tout numérique

La blockchain est un mécanisme dans lequel on se dispense des intermédiaires humains pour accorder sa confiance à des algorithmes. La blockchain Ethereum permet ainsi l’exécution de programmes informatiques « smart contract» en remplacement des contrats d’assurance standards, et qui permettent de déclencher des paiements dans certaines situations dès lors que certaines conditions sont réalisées. Par exemple, si une assurance anti-retard a été prise sur la blockchain sous forme de smart contract, un paiement sera automatiquement débloqué en faveur de l’assuré en cas de retard effectif de son train.

Ceci pose la question du pouvoir donné aux informaticiens et aux risques de piratage inhérent à cette délégation. La blockchain Ethereum ayant précisément subi une attaque en juin 2016 pour un préjudice d'environ 40 M$ détournés (4). Cette attaque avait  consisté en l’exploitation d’une faille dans le code de "The DAO", une plateforme de financement collaboratif sur la blockchain Ethereum. The DAO était le premier exemple de DAO, « Decentralized Autonomous Organization », organisations décentralisées dont les règles de gouvernance pour la communauté sont publiques et immuables car inscrites dans la blockchain et exécutées par un programme informatique. (5)

Un autre point sensible réside dans la gestion des conflits qui n’est pas permise dans la blockchain où l’absence de tiers de confiance va également avec celle de tiers de discussion. Dés lors qu’une transaction est effectuée et inscrite au registre, il n’est plus possible de la supprimer. On peut donc estimer que ce sont les contrats les plus simples dans leur mécanisme (« si … alors ») et qui ne prêtent pas à discussion possible qui sont les plus facilement intégrables à une blockchain.


(4) Une monnaie rivale du bitcoin est affectée par un piratage.

(5) Qu’est-ce qu’une DAO ?

Gouvernance

Le sujet de la gouvernance des blockchain reste aujourd'hui assez obscur. La plupart des blockchains étant en open source et nées d’initiatives communautaires (6), chacun peut librement proposer des modifications, adoptées ou non par la communauté. Il est donc difficile de trouver des consensus sur des évolutions dans un système basé justement sur la décentralisation. Comme évoqué précédemment, la modification de la taille des blocs est une des évolutions qui fut la plus discutée sur la blockchain du bitcoin mais pour laquelle la communauté n’est pas parvenue à se mettre d’accord (décembre 2016).

Suite à l’attaque contre The « DAO » (cf paragraphe précédent), les développeurs de la blockchain Ethereum ont créé une nouvelle blockchain avec un retour en arrière proposant le retour des éthers investis dans The DAO à leurs propriétaires. Les mineurs ont donc le choix entre suivre la majorité de la communauté (qui avait voté en faveur du changement de chaîne) ou miner sur l’ancienne s’ils sont trop attachés au principe d’infalsifiabilité de la blockchain (7). On peut en effet comprendre que certains mineurs n’acceptent pas de revenir en arrière : le principe intrinsèque des DAO repose sur le fait d’écrire leurs règles dans leur code sur la blockchain. Si les règles ont mal été écrites et qu’un participant utilise une des options laissées possibles à son profit, la question peut se poser de savoir qui est le responsable.  Chaque mineur a donc un choix à faire en la matière.

La blockchain Ethereum représente également un cas particulier sur le principe de gouvernance des blockchain, diverses structures juridiques (comme la Fondation Ethereum et la Fondation ETH DEV) ayant été créées afin de soutenir le développement la blockchain, suite à un appel au financement en 2014 qui avait permis de lever en bitcoins un montant équivalent à une somme d'environ 18 M$. (6)

A partir d'un code disponible en open source, il est tout à fait possible pour quiconque de créer sa propre blockchain et d’y effectuer les modifications qui lui semblent pertinentes. A charge ensuite de convaincre les autres mineurs de l’utiliser. On peut ainsi créer des blockchains privées en ne donnant accès qu’à un groupe limité d’utilisateurs de confiance afin de se prémunir d’éventuels utilisateurs malveillants. Dans ce schéma, il est également possible d’envisager un organisme de gouvernance reconnu par les utilisateurs du réseau qui pourra se charger des évolutions nécessaires et de la correction des bugs rencontrés. Ce genre de modèle intéresse plus particulièrement le secteur financier, qui pourrait ainsi créer une blockchain privée réservée aux institutions financières afin de simplifier leurs échanges.


(6) Blockchain, Eldorado ou mirage pour les services financiers ? (Revue Banque n°350)

(7) Le Hard Fork « The DAO » aura bien lieu, mode d’emploi

En conclusion...

C'est un fait : la technologie blockchain ouvre énormément de perspectives. Elle offre la possibilité d’une société décentralisée au sein de laquelle chacun pourrait contribuer avec les mêmes chances de succès (à puissance informatique égale). Si le secteur financier est particulièrement actif sur le sujet, c'est parce qu'il y voit, entre autres, des opportunités de diminution des coûts d’intermédiation et des risques de contreparties.

Elle stimule également l’innovation, et a été à l’origine de la création de multiples startups: plateforme d’achat/vente de monnaies virtuelles, plateforme de sauvegarde des clés privées, …

En revanche, avec la disparition des intermédiaires mais aussi des interlocuteurs physiques, cette technologie nous prépare à un monde "tout numérique" où les risques fraudes pourraient se résumer à des attaques informatiques. Les métiers de demain qui auront recours à la blockchain s'inscriront dans un monde où l’informatique ne sera plus un support au métier mais où le métier lui-même se traduira pas des algorithmes qui s’exécuteront seuls.

On comprend aisément que la blockchain va bien au-delà de simples enjeux technologiques mais qu'elle engage aussi la société dans son ensemble. Fascinante donc, mais à manipuler avec recul et précaution...


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